A boire et à manger...

Publié le par Sylvain Saint-Martory


J’invite celles et ceux qui me reprochent - surtout par volonté de me nuire plus que par souci d’honnêteté intellectuelle - de ne pas m’engager, à comparer, ne serait-ce que mon texte « Hommage à Redeker » avec celui du tartuffe Bernard-Henri Lévy dans son dernier bloc-notes « Pourquoi Redeker », publié dans Le Point, n° 1777 du 5 octobre 2006, reproduit ci-après.

 

Pour comprendre le discours à double sens de BHL, il suffit de se rappeler son propos d’octobre 2002 sur RMC Info, où il parlait d’un « islam des Lumières », ce qui le conduit encore aujourd’hui à prendre grand soin de distinguer l’islam et les islamistes : une soi-disant poignée de musulmans psychopathes qui n’auraient rien compris au Coran, le Livre sacré de cette religion de paix et de tolérance, comme en témoignent les attentats perpétrés ici et là au nom de l’islam !



Une chose est sûre : sans islam, il n’y aurait pas d’islamistes ! Et personne, dans le monde musulman, n’a donné jusqu’ici - sauf Mahomet qui était bien placé pour cela ! - le mode d’emploi du Coran, à savoir la lecture adéquate qui doit en être faite pour concorder avec nos droits de l’homme contemporain. Comme déjà dit et redit, ceci est impossible aussi longtemps que les musulmans de la planète ne disposeront pas d’une autorité religieuse universelle en mesure de décider de la manière correcte d’interpréter le Coran - susceptible par ailleurs de contredire le Prophète ! -, et de l’imposer ensuite à la communauté musulmane internationale.

 

D’ici-là, c’est-à-dire combien de siècles, voire de millénaires, il nous reste à contempler le spectacle quasi-quotidien des attentats perpétrés par les uns et par les autres dans les rues de Bagdad et d’ailleurs, au nom de leur Livre sacré soi-disant commun, où il y a précisément à boire et à manger - comme dans une auberge espagnole !

Et pendant ce temps, chez nous, Mouloud Aounit du MRAP ou Dalil Boubakeur, entre autres, viennent nous donner des leçons de morale pour avoir osé critiquer l’islam dans une république autrefois laïque, tandis que Bernard-Henri « pinaille » entre liberté d’expression et respect : y a-t-il une meilleure manière de ne pas dire ce qui déplaît, et de se ranger ainsi aux côtés de la Superstition..? ! Si, dans notre monde humain tout est relatif, la religion, toutes religions confondues – monothéistes ou non –, et la scolastique idéaliste de Descartes et de Kant prétendent exprimer LA Vérité absolue avec leur Dieu en tout point identique au Dieu religieux ; or, elle n’est pas celle de la « vraie » philosophie et de la mystique authentique. Alors, le devoir d’un « vrai » philosophe est précisément de confronter leur ABSOLU fictif ou dogmes à l’ABSOLU philosophique, et ceci ne peut se faire qu’au moyen d’arguments rationnels, à la manière de la démonstration more geometrico de Spinoza dans Ethique I.

La « vraie » philosophie, comme dit Spinoza, est celle qui concorde avec la Raison. Un soi-disant philosophe qui ménage la superstition religieuse n’est qu’un « philosopheur », comme je l’ai fait savoir sans barguigner à Bernard-Henri Lévy dans ma lettre du 11 février 2005 « Bernard-Henri Lévy, incarnation de la Superstition », consultable sur MSN, groupe « Philosophie contre Superstition »

Annexe :

Le bloc-notes de Bernard-Henri Lévy

Pourquoi Redeker


Bernard-Henri Lévy


Plus tard, peut-être, je dirai ce que je pense, sur le fond, du texte de Robert Redeker paru dans Le Figaro du 19 septembre.
Pour l'heure, le principe est simple et doit être affirmé sans nuance.
On ne discute pas avec un homme à terre, on le relève.


On n'engage pas une dispute avec quelqu'un qui, à cause d'un article, se voit menacé de mort, traqué, stigmatisé - on lui tend la main, on le défend et, quand on est un gouvernement, on le protège, on protège sa famille, on le reloge.


Bref, je me moque de savoir si ce qu'a dit M. Redeker était stupide ou avisé ; je ne veux pas avoir à me demander s'il est bon ou mauvais professeur, apprécié ou non par ses collègues, aimé de ses élèves, bien noté ; je ne veux même pas me poser la question de ce qu'il avait en tête au moment de donner pour publication le texte incriminé ; M. Redeker, dès lors que ce texte lui vaut d'avoir sur la tête, au pays des droits de l'homme et de Voltaire, une sorte de fatwa, mérite un soutien total, indiscuté, sans bémol.


La liberté d'opinion ne s'arrête-t-elle pas, s'inquiètent certains, là où commence le respect de l'opinion d'autrui ? Non. Elle s'arrête - et c'est tout autre chose - là où commencent l'appel à la haine raciale ou, pis, l'appel au meurtre sur fond de haine raciale : l'islam n'étant pas une race mais une religion, il s'ensuit que le texte, même faux, même idiot, d'un professeur de philosophie vitupérant le Coran n'entre pas dans cette catégorie ; et y entrerait-il d'ailleurs, l'argument religieux serait-il le masque, en la circonstance, d'une stigmatisation raciste inavouée, que ce serait aux tribunaux, et aux tribunaux seuls, d'en juger.


Le professeur n'était-il pas, insiste son ministre de tutelle, Gilles de Robien, tenu par un devoir, sinon de réserve, du moins de « modération » ? Non plus. Car autant le professeur est en effet astreint, dans l'exercice même de son métier, dans l'enceinte de sa salle de classe, à un devoir de neutralité, autant le citoyen est, quand il s'exprime dans un journal, libre de son propos ; et croire ou feindre de croire le contraire, confondre les deux rôles et adresser au chroniqueur les remontrances que l'on serait éventuellement fondé à adresser à l'enseignant (et encore ! dans les formes et procédures requises ! certainement pas comme cela, en public, par médias interposés, et alors que le nom de l'intéressé est déjà jeté aux chiens !), voilà qui est, de la part d'un ministre de la République, une incompréhensible ânerie doublée d'une faute juridique, politique, morale, inexcusable.


Et quant à ceux qui, enfin, soutiennent Redeker mais du bout des lèvres, quant à ceux qui ne le défendent qu'après avoir pris la peine de dire l'antipathie qu'il leur inspire, quant à ces gens qui, au MRAP par exemple, osent parler de « provocation » qui « génère l'inacceptable » et renvoient ainsi dos à dos l'inacceptable « agression » islamophobe et l'inadmissible menace de mort des islamistes qui lui « répondent », quant à tous ceux qui, çà et là, insinuent que si, ce qu'à Dieu ne plaise, ce « plumitif nauséabond » venait à subir le sort d'un Theo van Gogh à Amsterdam et était « puni » pour son « blasphème », il n'aurait que ce qu'il a cherché et serait la vraie cause du geste qui le tuerait - ceux-là, donc, c'est peu de dire qu'ils donnent la nausée : ils prennent le risque, et de justifier le crime, et d'affaiblir la République.


Car nous n'avons d'autre choix, au point où nous en sommes, que de défendre inconditionnellement le chroniqueur du Figaro, par ailleurs membre du comité de rédaction des Temps modernes.


Le contenu de son article, son caractère possiblement polémique ou injurieux, n'a, je le répète, strictement plus rien à faire dans un débat où ce qui est en cause, c'est, outre la vie d'un homme, ce principe de laïcité conquis de haute lutte, au fil des siècles, contre les abus de pouvoir, l'intolérance, d'autres Eglises.


Et il faut être conscient de ce que la moindre faiblesse dans ce débat, la moindre réserve orale ou même mentale quant à l'imprescriptible droit, pour chacun, de penser et imprimer ce que bon lui semble sur les religions et sur le reste, le moindre « malaise » concédé, la moindre « admonestation » ministérielle ou autre, la moindre indication suggérant qu'il y aurait des « limites » à ne pas franchir dans l'exercice de la libre pensée et qu'elles auraient, en l'espèce, été franchies serait un terrible cadeau fait à l'adversaire au milieu de la grande bataille en cours : comme dans l'affaire des caricatures ; comme au moment du tollé planétaire qui suivit le discours de Benoît XVI à Ratisbonne et le contraignit à des excuses ; comme avec la déprogrammation, la semaine dernière, à Berlin, d'un opéra de Mozart critiquant toutes les religions mais supposé, on ne sait pourquoi, offenser en particulier les musulmans...


Quand je dis « l'adversaire », j'entends (faut-il le préciser ?) non l'islam mais l'islamisme.


Quand je dis « la bataille en cours », je pense (faut-il, une fois de plus, le répéter ?) à la bataille que se livrent, en islam même, les partisans de la paix et de la guerre, de la démocratie et de la tyrannie - les héritiers de la haute civilisation musulmane et les prétendus théologiens qui tentent de s'approprier le Coran pour en faire un instrument de haine et de terreur.


© le point 05/10/06 - N°1777 - Page 146 - 906 mots

Publié dans PHILOSOPHIE

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