"Loyauté" et leçon de morale !

Publié le par Sylvain Saint-Martory

Le 27 novembre 2007


Objet :

« "Loyauté" et leçon de morale »

 

 

Mouvement démocrate

133 bis, rue de l’Université

75007 PARIS

Fax : 01 53 59 20 59

Courriel : f.bayrou@udf.org

 

Monsieur,

 

La leçon de morale donnée à Jean-Marie Cavada en matière de « loyauté », m’incite à vous rappeler la douzaine de lettres adressée depuis le 7 décembre 2004, toujours sans réponse à ce jour mais encore à votre disposition.

 

Je profite également de l'occasion pour vous faire remarquer, comme déjà dit et redit, que la principale caractéristique des soi-disant « vertueux » de toutes les époques est de reprocher aux « Autres » ce qu’eux-mêmes ont fait hier, et qu’ils recommenceront demain, à la première occasion où leurs intérêts « égoïstes et partisans » de toutes sortes leur (re)-commanderont; et vous n’y échappez pas plus que quiconque.

 

Dans la correspondance évoquée, je n’ai eu de cesse de montrer, voire de démontrer, les mensonges et les « croyances au miracle » de la Superstition sous toutes ses formes, et notamment les croyances idéologiques et moralistes superstitieuses que vous contribuez à colporter, au même titre que les soi-disant « élites » du monde de l‘information, de la politique, de l’intelligentsia et de nombre d’associations moralisatrices à sens unique, dénoncées dans le texte ci-après, Mensonges et lâcheté des élites, dont vous avez eu maintes fois connaissance.

 

Leur commun refus de débattre ne peut manquer de faire penser à un complot du silence, non concerté assurément, dans le but de dissimuler à l’opinion LA Vérité absolue, dont la foule superstitieuse n’a pas la moindre idée, tout en préférant la nier « absolument » sans le moindre argument à opposer : elle s'appuie donc uniquement sur la Foi, en aucun cas sur Raison ! 

 

Seule, pourtant, LA Vérité absolue est en mesure d’invalider tous les points de vue « relatifs partisans » des religions, des idéologies et des morales, en se bornant à faire ressortir la « relativité » de toutes, et donc leurs prises de position partisanesChacun s’empresse néanmoins d’ « absolutiser » ses points de vue seulement relatifs, c’est-à-dire de les présenter comme étant « absolument absolus » pour le plus grand profit de ses intérêts égoïstes individuels et collectifs de toutes sortes – électoraux, notamment, pour ce qui vous concerne !

 

Durant votre campagne présidentielle, et bien avant, je n’ai cessé d’attirer votre attention sur le péché capital de l’entendement humain, dont la principale conséquence est de tromper l’opinion. Forcément, chacun ment, dès lors qu’il prétend exprimer LA Vérité absolue par le biais d’opinions relatives – mais fictivement absolutisées ! Toutefois, vous avez préféré dédaigner cette « leçon de Vérité », témoignant par-là d’un manque d’honnêteté et de courage intellectuels incontestable. Vous avez choisi de rester sur le terrain « politicien », ainsi qu’en témoigne le débat discutable organisé entre les deux tours de l’élection présidentielle, même si la république bananière d’aujourd’hui s’en est très bien accommodée sans l'avis du Conseil constitutionnel !

 

Cependant, si vous estimez, que mes propos d ‘aujourd’hui et d’hier sont contraires à LA Vérité qu’ils prétendent exprimer, il ne tient qu’à vous d’en établir la fausseté et de démontrer la proposition inverse, à savoir la soi-disant vérité fondée sur le « dualisme » superstitieux des absolus, cette caractéristique commune aux divers modes d’expression de la Superstition : religion, métaphysique [Matérialisme et idéalisme], idéologie et moralisme [Morale et condamnations moralisatrices des Autres, au nom de LA Morale : laquelle ? !]

 

C’est sur le plan moralisateur que se situe votre condamnation de Jean-Marie Cavada, après qu’il eut exprimé « avoir épuisé sa réserve de loyauté envers vous ». Sans prendre parti pour autant sur sa décision de conduire une liste UMP à Paris pour les prochaines municipales, je ne peux manquer de vous rappeler, à propos de votre leçon de morale en matière de loyauté, que, dans ce domaine précisément, vous êtes bien conforme en tout point aux « vertueux » de toutes les époques, en reprochant aux Autres ce que vous-même avez fait, hier. Ainsi avez-vous réussi à faire oublier à l’opinion que vous étiez de droite, en trahissant peu ou prou votre camp d’appartenance précédent, avant d’adopter une stratégie dont personne n’avait entendu parler durant la campagne présidentielle de 2002 : en somme, une de ces révélations, dont Jeanne d’Arc et Bernadette Soubirous semblaient avoir l’exclusivité jusqu’ici ! ! ! Et là-dessus, Jean-Marie Cavada devrait être, lui, d’une loyauté sans faille…

 

Que je sache, comme chacun pourra le vérifier, vous avez été ministre dans des gouvernements de droite, en un temps où le mélange des genres n’était pas particulièrement la règle - sauf à trouver un ministre de gauche dans ceux d’Edouard Balladur et d’Alain Juppé ! ! ! Votre parcours chaotique à travers nombre de partis changeant constamment de nom, sans changer de tendance centre-droit, ne peut laisser supposer, un seul instant, à quiconque que vous ayez pu être de gauche jusqu’en 2002, et encore moins prêt à gouverner avec la gauche, comme votre projet de réforme de la loi Falloux, en 1994, suffirait à le confirmer, puisque la gauche a défilé majoritairement contre vous.

 

Par ailleurs, après tout ce que j’ai pu dire sur l’égoïsme humain, je trouve particulièrement malvenu de reprocher son « ambition » à Jean-Marie Cavada. En effet, l’ambition, moteur de chaque responsable politique dans sa décision initiale d'entrer en politique, n’est qu’une des trois manifestations - avec l’amour et l’argent - de notre égoïsme inné ; en conséquence, reprocher à quiconque son égoïsme humain ne témoigne pas d’une grande profondeur de réflexion ! Et ce d’autant moins que vous n’échappez pas vous-même à ce que vous reprochez précisément à Jean-Marie Cavada, à savoir l’ambition, ainsi que l’attestent les propos suivants de Simone Veil à votre encontre :

 

« J'ajoute que, dans sa démarche actuelle, François Bayrou me paraît davantage guidé par l'ambition personnelle que par les convictions. Je me souviens d'un échange orageux avec lui, en 1997, dans une réunion de l'UDF : j'invitais le parti à être moins timide sur la parité ou sur l'immigration. Il m'a lancé : "Avec de telles idées gauchistes, vous allez faire fuir notre électorat !" Paroles qui jurent nettement avec ses discours d'aujourd'hui... » [Le Point, n°1832 du 25 octobre 2007]

 

En conclusion, je vous rappelle sommairement en quoi consistent les mensonges et les « croyances au miracle » de l’idéologie, toutes idéologies confondues, et du moralisme, tous catéchismes sans exception, y compris le catéchisme soi-disant universel ou Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, dont seule l’inobservation est réellement universelle – sauf à vous d’établir le contraire à l’aune du devenir du monde depuis bientôt soixante ans !

 

Idéologie et moralisme ont en commun de se fonder sur un « absolu fictif », lequel résulte seulement d’un tour de passe-passe transformant le « relatif » de notre monde en soi-disant « absolu » - à commencer par son existence, mais c’est un autre problème ! Par chance pour les marchands de rêve, l’être humain est davantage porté par nature à croire, à imiter et à répéter, qu’à penser « vraiment ». Ainsi l’idéologie, par l’entremise de ses relais politiques, peut-elle accréditer l’idée, intellectuellement et philosophiquement aberrante, de l’avènement possible d’un monde « parfait » avec des humains « imparfaits », c’est-à-dire tout simplement égoïstes, comme je m’en suis déjà plus que largement expliqué. En somme, toutes les idéologies promettent ni plus ni moins que « transposer l’Idéal dans le quotidien », comme il en va pour le droit au logement opposable ainsi que pour l’instauration d’un climat planétaire sur mesure pour l’éternité ! ! ! Vous avez dit « pipo » ? ! OUI, je persiste et je signe…

 

Le moralisme, lui, se fonde seulement sur les trois fictions suivantes, amplement développées dans le courrier antérieur :

 

1 – la croyance en la coexistence d’un Bien et d’un Mal absolus, ce qui est une impossibilité absolue, philosophiquement parlant, puisque ce qui est réellement absolu ne peut être qu’unique, comme démontré more geometrico par Spinoza dans Éthique I. C’est pourtant sur ces valeurs relatives de bien et de mal « fictivement absolutisées » que reposent les condamnations moralisatrices de toutes les époques, dont ont été notamment victimes Socrate, le Christ, Giordano Bruno et Spinoza !

 

2 – l’artificielle division manichéenne des humains en deux catégories distinctes, aux frontières étanches : les bons, les « vertueux », les antiracistes aujourd’hui, d’un côté, et les méchants, les « salauds », les racistes, de l’autre : une fable, pourtant dénoncée sans ambiguïté, il va y avoir bientôt deux mille ans, mais qui n’est pas prête de s’éteindre, tellement il est « juteux » de faire culpabiliser les Autres ! ! !

 

3 – la croyance en un illusoire « libre arbitre », en vertu duquel il suffirait de vouloir pour pouvoir, très pratique pour condamner moralement les Autres, puisque cette pseudo-volonté libre est censée permettre à chacun de choisir librement entre le Bien et le Mal – en toutes circonstances évidemment, même lorsqu’il en va du sort de sa propre vie ! La « nécessité » du Dieu, ou substance, spinoziste ne conduit pas à de telles aberrations, puisqu’il n’y a ni Bien ni Mal absolus chez Spinoza ; et donc pas une seule fois le mot « morale » dans son Éthique !

Seuls les inconscients et les hypocrites pourraient, en théorie, faire valoir leur droit à juger et condamner moralement les Autres : les premiers, en effet, n’auraient pas pris conscience de leur véritable nature humaine, tandis que les seconds, en fidèles adeptes de la méthode Coué, auraient réussi à se convaincre qu’ils sont réellement « irréprochables », et donc autorisés à juger les Autres, au nom de LA morale !

 

Or, face à l’Idéal, chacun est forcément coupable, coupable de crime de lèse-Idéal. De ce fait, il n’y a pas, aujourd’hui plus qu’hier et demain, d’individus ni de groupes d’individus, TOUS critères d’appartenance confondus, réellement « IRRÉPROCHABLES » ! Alors, que tous ces soi-disant « vertueux »qui, à titre individuel ou communautaire, viennent faire culpabiliser la France et les Français au nom d’un passé révolu de plusieurs siècles ou de quelques décennies commencent à se regarder en face !

 

S’ils avaient conscience de la véritable réalité de leur nature humaine, ils se dispenseraient de juger moralement les Autres. Toutefois, comme ils en tirent profit, en vertu de l’adage « Culpabilisez, culpabilisez, c’est profitable pour nous », pourquoi se gêneraient-ils devant le silence complice des « politiques », des intellectuels, des médias et des associations moralisatrices adeptes du « deux poids, deux mesures », qui, de surcroît, enfoncent le clou ! ! !

 

Dans une époque qui se croit au comble du modernisme, l’être humain d’aujourd’hui se comporte comme ceux qui empoisonnèrent Socrate, envoyèrent le Christ sur la croix, Giordano Bruno au bûcher et qui excommunièrent Spinoza : finalement, pas de quoi être fier d’être un humain ! Le rôle des élites devrait être de réveiller la foule superstitieuse pour la rendre consciente de sa réalité, encore faudrait qu’elles-mêmes commencent par prendre conscience de leur égoïsme, et cessent toute condamnation moralisatrice ! ! !

 

Or, faute de participer au seul et unique véritable débat d’idées, tel que précisé dans le texte annexé, les prétendues « élites » dénoncées manifestent plutôt leur intention délibérée de continuer à colporter les mensonges et les « croyances au miracle » de la Superstition sous toutes ses formes, de sorte que les humains en ont encore, pour des siècles et des millénaires, à entendre ses sornettes et ses jugements moralisateurs !

 

Dans l’attente de vos objections éventuelles, qui ne devront pas manquer de tenir compte de tous les arguments déjà avancés, je vous remercie de votre attention et vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

 

 Annexe : Mensonges et lâcheté des élites

[Les éventuels défauts de présentation sont indépendants de ma volonté]
































Monsieur François Bayrou

Publié dans COURRIER "Politiques"

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